Ces derniers jours, il semble qu’il soit de bon aloi de se
dire contre l’arrivée de réfugiés syriens.
Un peu partout pleuvent les commentaires, que ce soit dans les médias
sociaux ou traditionnels, de gens qui demandent qu’on mette un terme à cette « intrusion »
islamiste en sol Québécois.
C’est ça, la liberté d’expression. C’est le prix à payer pour vivre là où tous
sont libres de s’exprimer : il y a des gens qui prennent la parole, et
avec qui on n’est pas d’accord. Je ne
remets pas ça en doute, même si ces propos me choquent souvent.
Mais c’est aussi cette liberté d’expression que j’utilise en
ce moment en noircissant quelques lignes de votre écran dans l’espoir de vous
faire réfléchir quelque peu.
Je dis ça de même. Le Québec accueille bon an, mal an, 50 000
immigrants.
Le Canada? On parle d’environ
250 000 par année environ.
Combien de réfugiés veut-on accueillir, en regard de la
crise actuelle? On parle d’environ 25 000
pour tout le Canada… Moins de 6000 pour le Québec.
C’est ça l’invasion syrienne? Ou plutôt, le péril du Croissant musulman? Faudrait pas charrier.
Un peu partout circulent de fausses affirmations qu’on
réfute peu.
Du moins, pas avec la même
ferveur que sont propagées ces calomnies. Comme par exemple, cette chaîne de lettres, devenue statut Facebook
depuis quelques années, affirmant sans l’ombre d’une nuance que les réfugiés
reçoivent 29 000 par année du gouvernement, faisant de ceux-ci des personnes
ayant un niveau de vie plus décent que nos retraités pure laine qui ont
travaillé toute leur vie ici.
Mensonge. Et mal
informés ou malveillants, plusieurs contribuent à perpétuer cette grossière
exagération en la partageant à ses contacts.
En réalité, le gouvernement fédéral calcule combien l’aide
sociale donnerait à une famille dans chaque province et verse un montant
équivalent, auquel on rajoute ces quelques milliers de dollars pour « partir »
dans la vie. On est loin de faire de
ceux-ci des « BS de luxe »
Parce que oui, leur vie part de zéro. C’est un statut de
réfugié qu’ils ont. Et non, ce ne sont
pas tous les immigrants qui ont droit à ce montant : seulement les
réfugiés.
On rétorquera qu’ils viennent prendre nos emplois. Qu’ils viennent « voler nos jobs ». Après tout, on en arrache assez comme ça!
Excusez pardon, mais il faut connaître peu de choses en
démographie et en économie pour comprendre que le Québec a plus à perdre de ne
pas accueillir d’immigrants qu’à en accueillir.
Nous ne faisons pas suffisamment de bébés, notre indice de fécondité est
nettement insuffisant pour remplacer la population vieillissante qui passe à la
retraite. Il faut vivre sur une autre
planète pour ne pas avoir entendu parler du problème du vieillissement de la
population. Alors, à moins de se mettre
en vitesse grand V afin de créer un baby boom à court terme, il faut des
immigrants.
Pour ce qui est de emplois, j’oserais vous dire que si vous
craignez qu’une personne ne parlant ni français ni anglais, traumatisée par un
conflit armé et dont on ignore tout des compétences vous « vole votre
emploi », je doute sincèrement de vos compétences.
Alors, on me dira qu’ils sont des musulmans ; leurs valeurs
ne sont pas les nôtres! Nous sommes
Québécois, nous devons protéger qui nous sommes!
D’abord, statuons une chose : les Syriens ne sont pas
tous musulmans. Il y en a des chrétiens,
des Juifs, etc. Être arabe n’est pas
synonyme d’être musulman. Allez demander
à Google, si je vous apprends quelque chose… je n’ai pas le courage de vous
expliquer ces nuances au moment où j’écris ces lignes.
D’autre part, je tiens à l’affirmer haut et fort. Je suis nationaliste, même indépendantiste. J’ai toujours cru qu’il faille franciser les
immigrants. Je suis en faveur de la loi
101 et je crois à la nécessité d’affirmer les valeurs québécoises. À travers une charte? Pourquoi pas!
On l’a bien diabolisée, celle-là, à tort ou à raison. À tort, selon moi. Probablement parce que le PQ a été trop
entêté à refuser les amendements qui auraient pu la rendre acceptable à un plus
grand nombre de personnes et aux yeux de la CAQ. Mais là n’est pas mon propos.
Malgré mon nationalisme, je pense encore qu’il faille ouvrir
nos portes à ces immigrants. Je suis
gêné des propos xénophobes que j’entends et lis un peu partout.
D’abord, parce que ce que fuient ces réfugiés, c’est la même
chose que nous condamnons : l’intégrisme.
Musulman n’égale pas intégrisme.
Je dis ça comme ça… La Bible renferme plusieurs passages
violents. De l’inceste. Dieu tue même des homosexuels, considérés
comme dépravés. Les chrétiens n’ont pas
de leçon d’histoire à donner à quiconque, sachant que des papes ont été
corrompus à l’os et que des crimes ont longtemps été perpétrés au nom de Dieu. Croisades, Inquisition, Indulgences, Ku Klux
Klan, etc. etc. Mon propose ne vise pas à nous culpabiliser d’être de culture
judéo-chrétienne, mais à exposer que Dieu, comme Allah, a le dos large.
C’est un peu ce que fait Daesh, le fameux groupe armé État
islamique. Celui-ci s’en prend à toutes
les populations qui n’ont pas la même doctrine qu’eux, c’est-à-dire une
interprétation de l’islam que la très vaste majorité d’entre eux
rejettent. Des fatwa un peu partout dans
le monde ont été décrétées, celles-ci affirmant que ce que prône le groupe armé
n’est pas conforme aux valeurs du Coran.
Pour me faire comprendre, disons grossièrement que c’est un
peu comme si des évêques excommuniaient un groupe de catholiques un peu trop
radicaux.
Sans entrer dans le mélodrame, il faut savoir que ces
réfugiés quittent une Syrie à feu et à sang depuis quatre ans, pris entre des
groupes radiaux ou non, déchirés à droite et à gauche par une guerre civile où
des dizaines de factions s’opposent pour tenter de renverser un régime
politique – celui de Bachar al Assad, qui n’est pas réputé pour être du côté
des « gentils » non plus.
Alors, les chances qu’ils soient radicaux, ces réfugiés,
sont minimes. Nulles? Personne n’osera l’affirmer. Minimes? Oui.
Surtout, connaissant le contexte, pensez-vous honnêtement qu’ils
passeront les tests de sécurité? Pensez-vous
que les autorités canadiennes veulent vraiment se retrouver avec un
attentat-suicide sur les bras dans six mois, un attentat qui serait perpétré
par un réfugié? Il perdrait la face
totalement.
Advenant le cas qu’un terroriste réussisse à s’immiscer
parmi ces réfugiés et qu’il réussisse à passer les contrôles de sécurité,
pensez-vous honnêtement qu’il aura le loisir de mettre à exécution ses plans,
sachant que les projecteurs de tout le pays seront braqués sur ces nouveaux
venus?
On me dira alors qu’ils n’ont qu’à aller dans des pays
musulmans, là où leurs valeurs concordent avec les leurs, comme en Arabie
Saoudite, par exemple.
Vraiment?
Ces pays sont presque aussi tyranniques que ne l’est le
régime d’Assad en Syrie – celui qu’ils essaient de fuir. Souvent, ces autres
pays arabes voient dans ce conflit une occasion d’exercer leur influence dans
la région. Non, cette option n’est pas
la bonne.
Mais alors, est-ce que les Syriens nous accueilleraient si c’était
nous qui étions dans la misère?
Peut-être que oui.
Peut-être que non.
Voyez-vous, quand on donne du cannage aux démunis dans le
temps des Fêtes, nous donnons par générosité.
Est-ce que ces mêmes démunis nous rendraient la pareille si c’était nous
qui étions dans la misère?
Peut-être que oui.
Peut-être que non.
D’ailleurs, le groupe armé « État islamique »
espère probablement qu’on agisse comme certains l’ont fait en région, en
hissant des panneaux, banderoles et draps contours avec écrit en grosses
lettres « Réfugiés, non merci ».
Une belle façon de leur donner raison : les musulmans ne peuvent
pas s’intégrer dans le monde occidental, ce monde qu’il faut détruire. Cela contribue à créer chez les plus faibles
d’esprit d’entre eux une rancœur, faisant de celle-ci une véritable usine à
combattants djihadistes ou, encore pire, à terroristes qui s’en prennent à des
innocents.
Le pire, dans tout ça, c’est que ces banderoles sont hissées
la plupart du temps dans des régions où il n’y a pratiquement d’immigrants. Advenant le cas qu’un Syrien se perde et se
retrouve à Saguenay, Baie-Comeau, Gaspé ou Rouyn, les chances qu’il organise
des attentats là-bas sont aussi grandes que celle du gouvernement Couillard d
nationaliser les banques au Canada…
Voyez l’ironie.
Je crois sincèrement que ces régions auraient même tout
intérêt à accueillir ces réfugiés, pour plusieurs raisons.
-
La plupart des régions ressources vivent un
recul démographique. Les jeunes quittent
vers les grands centres, ce qui rend celles-ci moins dynamiques au point de vue
économique. Dans certains cas, cet
afflux de main d’œuvre pourrait être même un atout, surtout si elle est
spécialisée.
-
On pourrait même sauver, dans certaines
communautés, des écoles en accueillant ne serait-ce qu’une ou deux familles. Et je n’exagère pas. Plusieurs écoles de village sont menacées de
fermeture d’une année à l’autre, faute d’élèves.
-
Il est beaucoup plus facile de franciser une
population dans un milieu où la majorité de la population est francophone. Les envoyer dans les grandes villes, c’est
prendre la chance qu’ils préfèrent l’anglais à la langue de Molière.
-
Ces réfugiés, s’ils se sentent bien accueillis
dans des petites communautés, ont davantage de chances de développer un
sentiment d’appartenance envers celle-ci.
Les valeurs défendues en région (communautarisme, entraide) sont déjà
les leurs.
-
L’arrivée d’immigrants ne peut qu’enrichir la
culture Québécoise. Les Syriens
voudront, s’ils se sentent intégrés, partager leur expérience de vie, raconter
ce qu’ils ont vécu.
-
Une fois intégrés dans leur milieu, ces immigrants
seront un modèle positif du modèle occidental pour ces musulmans qui crachent
leur fiel sur celui-ci.
Évidemment, tout n’est pas simple et accueillir ces réfugiés
sera une longue route parsemée de défis et embuches. On peut penser à l’aide psychologique qu’il
faudra fournir, à la francisation qui ne sera pas une tâche facile, surtout avec
ceux qui ne parlent qu’arabe. De plus,
il faudra combattre l’attrait des grands centres comme Montréal et Toronto qui
rendra la rétention de ces immigrants difficile à long terme. Mais il faut éviter la ghettoïsation.
Et c’est notre devoir d’essayer, malgré ces défis.
Et c'est aussi aux gouvernements d'être plus transparents afin de rassurer la population. Le processus me semble trop opaque, en ce moment.
Advenant le cas que des Syriens soient installés dans ma
ville d’adoption, trouverai bien le moyen de faire ma part. Si tous les gens de bonne volonté s’y
mettent, j’ai confiance que les Québécois sont capables des plus grandes
choses.
Dernier point. On me
dira « Pourquoi eux et pourquoi pas tel autre peuple qui est dans la
misère ».
Excellente question. Excellente.
Pour le moment, l’urgence est là. C’est ma seule réponse pour le moment.
Je ne suis pas naïf, je ne vous ai peut-être pas
convaincu. Mais j’espère vous avoir fait
réfléchir.
Merci de m’avoir lu.
Je vous autorise à partager.
Jimmy Grenier
Lévis